. : fév 2007 -
L’art du pochoir Le pochoir urbain, ou pourquoi pas
rural d’ailleurs, a longtemps été considéré
comme un art mineur, voir une manifestation de plus de l’incivisme
citoyen s’étalant sur les murs… Mais les choses
changent. Oh bien sûr, d’abord à l’étranger,
alors que les premiers artistes du pochoir sont français
pour la plupart.
En novembre dernier, une toile de l’artiste anglais Banksy
a ainsi atteint la coquelette somme de 87 000 euros à
une vente aux enchères de Sotheby's à Londres.
Et un peu plus tôt, Angelina Jolie avait lâché
pas moins de 300 000 euros en toiles du même Banksy qui
faisait une expo à LA… Du coup, Banksy a ouvert un
magasin sur son site, gratuit bien sûr, et où il signale
gentiment qu’il est toujours mieux d’imprimer ses visuels
sur la bonne imprimante du bureau, à l’heure du déj.
Alors, que se passe t-il ?
On assiste à un phénomène de reconnaissance
d’artistes qui œuvraient pour la plupart dans l’ombre
depuis des années, plus par souci d’éviter les
problèmes que par posture idéologique.
C’est que le pochoir a longtemps été assimilé
aux tags, graffs et autres expressions visuelles de rues.
Ils ont pour nom Blek
le rat, Nemo,
Miss Tic,
Jérôme
Mesnager, Jef
Aerosol, Speeddy
Graffito…
Pour certains, l’anonymat a laissé place à la
célébrité, pour d’autres c’est
au contraire une garantie renouvelée de liberté d’action,
ainsi que l’expliquait Banksy dans une interview
donnée à Shepard Fairey, autre graphiste illustre
et créateur d’Obey
the Giant.
Le pochoir est donc devenu tendance, et se recycle dans la communication,
dans les galeries d’art et les médias.
Mais à l’origine, le pochoir a pour vocation de réinvestir
l’espace public, d’y apporter des traces visuelles.
Le mur devient support d’expression personnelle, sans demande
d’autorisation ou de subvention. Le pochoir laisse la trace
d’un passage créatif, signale au passant celui qui
l’a précédé.
Alors aujourd’hui, avec sa valeur créative –
et financière, reconnue, le pochoir devient une espèce
en voie de disparition à protéger.
A protéger de la rénovation urbaine, qui réduit
en poussières les vieux murs qui offraient un support de
prédilection aux artistes. A protéger aussi de la
lutte contre les graffitis, initiée par les grandes villes
et qui ont longtemps mis dans le même sac pochoirs et graffitis.
Et enfin à protéger des tags, car comme l’expliquait
un article du Monde, les tagueurs ont compris que "Taguer sur
des pochoirs, c'est être sûr qu'on ne sera pas effacé »….
Le pochoir est donc l’une des dernières manifestations
d’un art gratuit, accessible à chacun, au gré
de ses promenades, et qui vise à susciter la réflexion.
Deux sites de références permettent d’aller
à la rencontre des ces artistes. L’un américain,
Wooster
Collective, est peut être plus proche du street graffiti
à l’américaine, mais se veut ouvert dans la
démarche. Un vrai espace de liberté visuelle.
L’autre, La
Panse, est consacré aux artistes francophones. Une précieuse
collection de pochoirs, mais aussi des infos sur les expos.
On peut aussi découvrir ce
site, journal des cultures nomades et populaires, plein de reportages
photos attirants et dépaysants, sur lequel existe une rubrique
Street Graphics.
Un fan de Miss Tic a également créé un Fan
Club de l’artiste, organisant des promenades vers la Butte
aux Cailles, pour découvrir les œuvres de la Miss.
Pour les amateurs de bouquins, on peut trouver un
livre paru sur Miss Tic. Un autre bouquin,
de Daniel Pennac, est aussi paru récemment sur l’œuvre
de Nemo.
Enfin, je ne peux que vous conseiller le bouquin
récent lui aussi de Banksy, et pas cher.
Et pour ceux qui souhaitent en savoir davantage sur la culture anglo-saxonne
du street art, cette synthèse
(en anglais) d’une thèse faite sur le sujet. |